lundi 1 mars 2010

Work In Progress (42)


La terrasse aux bambous, journal


Je me souviendrai toujours de cette espèce de doigt tordu, le mien, qui appuya sur la sonnette du Pavillon J. De cette longue minute élastique et à vau-l’eau qui était en train de devenir moins que mon lien avec le dehors. J’allais entrer chez les écloppés de la vie, les toxicos, les bruts de décofrages, les abîmés, tous ceux qui traînent sur les bas-côtés. La lourde porte en bois se referma dans mon dos, mon lien avec le dehors désormais coupé. Ce fut comme un soulagement, à vrai dire, une route à suivre vers le salut. J’avais confiance.

Comme je venais de mon plein gré, on me laissa mes affaires, sauf le razoir pour que je ne me tranche pas la gorge - et j’évitais aussi le pyjama bleu réservé aux cas graves pour qu’ils ne s’évadent pas. On me conduisit à ma chambre; j’y retrouvai François B., alcoolique comme moi, devenu mon ami depuis.
La première journée passa vite, installation, sieste, pétards. De quoi réjouir un forcené de l’enfermement. Ou un de ces voleurs et tapeurs de clopes qui vivent ici à plein temps, histoire d’éviter la rue - et ils sont nombreux, très nombreux...
Au Pavillon J, on ne sait rien faire d’autre que fumer... Alors je fumais copieusement plusieurs paquets par jour, à en être malade. Nous expédiions les déjeuners et les diners en moins de dix minutes, pour aller s’en griller une, histoire de ne pas perdre le rythme.
Les jours passant, mon état s’améliorait. J’eus la visite de mes parents. Maman tordue avait déjà sa canne, et elle me trouva courageux de faire cette cure; mais avais-je une autre solution pour tout simplement continuer à vivre?
J’avais oublié mon transistor mais pas mon mobile. Hélas mes amis ne me firent pas signe. Sauf Sylvie S., ma sœur virtuelle, Sister In Web. Et puis, comme je tardais à m’y attendre, L. m’envoya un SMS.



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