jeudi 10 décembre 2009

Work In Progress (25)


La terrasse aux bambous, journal


Le Journal d’Aran, de Nicolas Bouvier, me tombait des mains, et pourtant c’est mon écrivain-voyageur préféré. Mais je devais me faire une raison, mon excitation à l’idée de voir L était au comble de la démesure. Je me souvenais de tout, nos nuits téléphoniques et amoureuses, à parler, parler, et parler encore; tout en L me faisait chavirer, et là, dans quelques heures, j’allais m’échouer, rayonnant de bonheur, sur la plage du réel. L et moi étions résolument modernes.

Ce qui est bien quand on regarde la télé à quatre heures du matin, c’est qu’on s’endort. J’éteignis donc le meuble couleur, mis un disque de US3 et sortis sur la terrasse avec des cloppes et mon mobile. Je lui envoyai un texto qui me suffoqua d’originalité: Où es-tu? (Phrase qui, un an plus tard, allait résonner beaucoup moins claire que dans le roman de Marc Levy). Je t’aime, eus-je comme réponse, je file, je vole, vers toi mon amour. Je t’attends comme un loup, plus souple qu’un berger, oh ma corbeille blonde. Pourquoi Jean Genet à ce moment-là? Je l’ignore, un coup de frime ou une incroyable prémonition? Sur mon cou...
J’allumais ma énième Dunhill sur la terrasse aux bambous, un verre de Talisker posé sur la table, mon amour, Love Of My Life, en route vers mes bras et ma bouche, je respirais à fond, j’étais bien, le temps suspendu ne s’était aperçu de rien, mais j’avais arrèté toutes les horloges. J’étais en vie. Je t’attend mon amour.


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